Dante 700 ansImages4. Le Paradis selon Sophie Moraine

13 décembre 20210


Dans le ciel des Étoiles (chant XXV), saint Jacques interroge Dante sur l’Espérance alors que l’éblouissante clarté de saint Jean l’aveugle. Dans le chant XXVI, le poète est encore interrogé par saint Jacques sur la Charité et retrouve la vue, puis il rencontre Adam qui répond à ses questions. Au chant XXVII, il quitte en compagnie de Béatrice la constellation des Gémeaux pour monter vers le neuvième ciel, le Cristallin ou Premier Mobile. Dante aperçoit un point très lumineux du firmament, entouré de neuf choeurs angéliques (chant XXVIII). Béatrice énumère et lui explique les hiérarchies célestes puis, après être restée silencieuse, elle décrit les anges rebelles et les anges fidèles (chant XXIX). Une fois de plus Dante perd et retrouve la vue alors que la beauté de Béatrice grandit. Leur ascension vers l’Empyrée les rapproche du fleuve de lumière et de la rose blanche des bienheureux (chant XXX).
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Sophie Moraine (1972- )

Originaire d’Orléans, cette artiste peintre plasticienne a fait différentes écoles d’art et notamment l’école du Louvre. Tout en poursuivant ses recherches en arts plastiques, elle assure bénévolement le secrétariat du Labo des arts, association d’accueil en résidence artistique pluridisciplinaire. Depuis longtemps, Sophie Moraine approfondit la Divine Comédie qu’elle relit tous les ans et inspirée par les travaux d’Aby Warburg (l’inventeur de l’iconologie), elle oriente son travail de recherche sur l’art de la mémoire. Si Dante constitue une référence importante dans son processus créatif, on reconnaît aussi dans son travail les influences de Bachelard, Beuys, Kandinsky, Louise Michel.

Mon intérêt pour la Divine Comédie est sans doute lié à l’histoire familiale d’un aïeul caché et mythique ayant fui l’Italie pour des raisons obscures. Le fait aussi d’avoir entendu citer Dante à de nombreuses reprises à l’école du Louvre est un élément à prendre en compte ainsi que plusieurs voyages et lectures à la recherche de moi et j’ai compris le sens des mots “voyage initiatique”. La technique du noir et blanc s’est imposée. Depuis que je suis adolescente, j’achète de manière obsessionnelle les mêmes carnets au format A4, à couverture noire (j’en possède plus de 80). Le noir est lié aussi au travail métaphysique de Pierre Soulages. (propos de Sophie Moraine).

Dante aveuglé par la lumière de saint Jean l’évangéliste. 2018. Paradis, chant 25. Sophie Moraine.

La Divine Comédie est le livre de ma vie, livre initiatique, livre de la métamorphose. Il a 700 ans et est très contemporain. Les fluctuations de l’âme humaine sont intemporelles ! Histoire d’amour (avec le trio Béatrice, Dante, Virgile), histoire de vengeance (Dante a fui sa ville chérie, Florence puisqu’il a été condamné à mourir par le feu), histoire politique (guerre fratricide entre les Gibelins et les Guelfes- blancs et noirs) et petites histoires dans la grande histoire, les invisibles qui demandent à être dévoilés (le boulot des artistes, entre autres !) : tous ces éléments créent le mythe (propos de Sophie Moraine).

Apparition d’Adam. 2018. Paradis, chant 26. Sophie Moraine.
Ciel du 1er mobile, le 9ème ciel, celui de la mesure du temps. 2018. Paradis, chant 27. Sophie Moraine.
Hiérarchie angélique. 2018. Paradis, chant 28. Sophie Moraine.
Variété des prédicateurs. 2018. Paradis, chant 29. Sophie Moraine.

La technique de l’acrylique noire sur papier, travaillée comme l’aquarelle, a été utilisée pour environ 400 illustrations entre 2016 et 2018, dont 172 pour le Paradis. Les Images Frappantes de ma Divine Comédie sont réalisées en monotype : principe d’impression de peinture acrylique noire sur plexiglas, transféré sur papier. Un seul exemplaire, d’où la dénomination de “monotype”. Plus j’ai avancé dans le Paradis, plus les monotypes sont fréquents, symbolisant les fulgurances paradisiaques (propos de Sophie Moraine).

Plongeon dans le fleuve de la lumière. 2018. Paradis, chant 30. Sophie Moraine.

Béatrice apparaît au Paradis terrestre et accompagne Dante au Paradis céleste. Elle est le “soleil”, “la mère”, “la belle dame”, “la muse” éclatante de lumière qui rit et qui présente les élus du Paradis céleste. Les images foisonnantes que provoque Dante pour le spectateur sont des “Images frappantes” puisque ordonnées chacune dans des lieux précis. Dante est minutieux dans chacune de ses descriptions. Il utilise la répétition pour que les images soient mémorisées. Elles provoquent de la pensée en mouvement. Il utilise les avertissements, les prophéties, les songes, les enseignements, les allégories, la mythologie gréco-romaine. Les images, les chiffres, les lettres, les mots (en particulier les néologismes du Paradis) et les sons ont un pouvoir magique à caractère talismanique. L’imagination du lecteur est fortement ébranlée. Dante est un sculpteur. Il fait apparaître des images tridimensionnelles chez le lecteur, multipliant les scènes, les informations, les symboles. La Divine Comédie est une œuvre à lire et à relire, un puits sans fond de découverte pour le lecteur (propos de Sophie Moraine).

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La Divine Comédie vue par 15 artistes contemporains

Par Andrea Ciarlariello

En 2006, le Comité Dante de Foligno, sous la direction d’Italo Tomassoni et soutenu par la Municipalité avec la contribution de la Fondation de la Cassa di Risparmio di Foligno, a lancé un projet ambitieux.: demander à des artistes contemporains d’interpréter et d’illustrer la Divine Comédie,

Ont répondu à cet appel, 15 artistes représentants de la Transavanguardia, de l’École de San Lorenzo, de l’Anachronisme et de l’Hypermanierisme, qui ont produit pour l’occasion 3 ou 4 œuvres chacun.: Omar Galliani, Ivan Theimer, Bruno Ceccobelli, Mimmo Paladino, Giuseppe Gallo, Enzo Cucchi, Piero Pizzi Cannella, Stefano Di Stasio, Marco Tirelli, Sandro, Gianni Dessì, Nunzio Di Stefano, Emilio Isgrò, Giuseppe Stampone et Roberto Barni

Après avoir enchanté le public de Buenos Aires, où l’exposition a été présentée à l’occasion du 83e Congrès international de Dante ce corpus constamment mis à jour est exposé du 5 au 16 mars au Palazzo Firenze sous la coordination scientifique de Chiara Barbato et Valentina Spata avec le soutien du Ministère du Patrimoine Culturel et des Activités en collaboration avec la Municipalité et le Comité Dantesque de Foligno.

Selon le Secrétaire général de La Dante Alighieri, Alessandro Masi: « Dante représente un défi incontournable pour les artistes du XXe siècle : De Guttuso, qui a illustré toute la Divine Comédie, à Dali et Isgrò lui-même. Dante représente un point fondamental dans l’imaginaire : là où l’homme traverse le sacré. Que nous le voulions ou non, nous appartenons au sacré et c’est au sacré que nous revenons. Dante nous le rappelle. L’art ne peut s’empêcher de révéler le divin et, comme le dit l’exégète français Paul Beauchamp, de rendre l’insupportable supportable ».